Au pénal
La première démarche est de faire constater l’infraction par l’inspecteur du travail pour qu’il dresse, le cas échéant, un procès-verbal (art. L. 8113-7 C. trav.). Celui-ci est transmis au préfet du département et au procureur de la République qui jugera de l’opportunité des poursuites devant le tribunal correctionnel.
La victime du délit d’entrave peut également déposer une plainte simple (auprès d’un service de police ou directement au procureur de la République), une plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance (TGI) ou une citation directe délivrée à l’auteur de l’infraction directement devant le tribunal correctionnel par l’intermédiaire d’un huissier.
Pour que la constitution de partie civile ou la citation directe soient recevables, il faut justifier d’un intérêt à agir, c’est-à-dire démontrer que le délit entraîne un préjudice personnel et direct. La prescription du délit d’entrave est de 6 ans (art. 8 C. proc. pén.).
Il faut que les faits relevés constituant une violation ou un non-respect d’articles du Code du travail soient précisément visés dans le même article qui réprime et prévoit la sanction.
Exemple : l’article L. 2317-1 du Code du travail prévoit l’atteinte au droit à la constitution du CSE et la sanction.
Les syndicats, représentatifs ou non, au nom de la défense des intérêts de la profession, ont toujours un intérêt à agir pour faire cesser une entrave aux institutions représentatives du personnel, et de se porter partie civile.
Sur les actions au pénal pouvant être intentées en cas de délit d’entrave, voir supra « Discrimination syndicale, au pénal » (plainte, plainte avec constitution de partie civile, citation directe, aide juridictionnelle).
Au civil
La victime du délit d’entrave peut décider de ne pas porter plainte et se tourner uniquement vers les juridictions civiles (TGI en général) pour demander des dommages et intérêts en réparation de son préjudice.
L’action sera portée devant le tribunal d’instance ou de grande instance selon le montant des sommes demandées :
- au tribunal d’instance : demande portant sur une somme inférieure à 10 000 euros ;
- au tribunal de grande instance : demande portant sur une somme supérieure à 10 000 euros.
Le Parlement a adopté définitivement le 19/02/2019 le projet de loi Justice qui prévoit de fusionner les TI et les TGI.
D’autre part, si l’entrave crée un trouble manifestement illicite, la victime peut saisir le juge des référés du conseil de prud’hommes pour obtenir le retour à la légalité (exemple : réintégration dans son emploi d’un salarié protégé licencié sans autorisation…).
Exemple d’action pouvant être menée conjointement au pénal et au civil :
L’absence de consultation régulière du CSE sur une décision de l’employeur
Le CSE, dans les entreprises d’au moins 50 salariés (en deçà, il n’a pas la personnalité civile), peut agir en justice au pénal, au titre du délit d’entrave, ainsi qu’au civil, au titre du trouble manifestement illicite devant le juges des référés, pour demander la suspension de la mise en oeuvre de la décision (exemple : suspension du projet de réorganisation de l’entreprise), voire la remise en état de la situation, dans l’attente d’une consultation régulière.
Le CSE peut également demander des dommages et intérêts en réparation du préjudice (Cass. soc. 10/07/2013, n° 12-14629 et Cass. soc. 25/09/2013, n° 12-21747).
Focus : Différences entre le délit d’entrave et le délit de discrimination syndicale
Délit d’entrave
Ce délit nécessite la conjugaison de trois éléments :
- l’élément matériel (le fait incriminé) ;
- l’élément légal (le non-respect de la loi) ;
- l’élément intentionnel (la volonté du délinquant qui n’a pas besoin d’être prouvée car elle est présumée par la constatation de l’élément matériel).
L’incrimination d’entrave suppose une atteinte à une institution représentative, syndicale ou l’un de ses membres.
Délit de discrimination syndicale
Le délit de discrimination nécessite également ces 3 éléments mais, en plus, il suppose que le comportement de l’employeur porte atteinte à la liberté syndicale, c’est-à-dire à l’appartenance syndicale (art. L. 2146-2 C. trav.), que l’on soit représentant du personnel, désigné ou simple syndiqué. Le champ de la discrimination est donc plus large que celui du délit d’entrave.
Lorsque les mesures discriminatoires visent un élu du personnel appartenant à un syndicat, cela aboutit, dans les faits, à un recoupement partiel de deux infractions distinctes : l’infraction visée par le délit d’entrave et celle visée par le délit de discrimination syndicale. Dans ce cas, les deux peines sont applicables.