Les conséquences d’un licenciement prononcé sans autorisation ou annulé : la réintégration et/ou l’indemnisation des salariés protégés

Le salarié protégé, en cas de licenciement prononcé sans autorisation ou annulé après un recours hiérarchique ou contentieux, dispose d’un délai pour formuler une demande de réintégration dans l’emploi, et/ou d’une indemnisation correspondant à la perte des salaires sur la durée de protection afférente à son mandat qui doit être rétabli si l’IRP n’a pas été renouvelée.

Licenciement sans autorisation ou malgré un refus d’autorisation

La rupture du contrat par l’employeur d’un salarié protégé sans qu’il dispose d’une autorisation administrative préalable est nulle. Le salarié a alors le choix soit de demander sa réintégration, qui est de droit dans son emploi – sur décision du juge des référés en cas de refus de l’employeur –, soit une indemnisation. 

A noter : attendre l’expiration de la période de protection d’un représentant du personnel pour convoquer à un entretien préalable au licenciement pour des faits survenus au cours de celle-ci entraîne la nullité du licenciement (Cass. soc. 28/02/2018, n° 16-19562).

Le salarié a demandé sa réintégration 

  • Le droit à réintégration dans l’emploi et à indemnisation 
    Si le salarié a demandé sa réintégration avant la fin de la période de protection (ou après pour des raisons qui ne lui sont pas imputables), il a droit au versement d’une indemnité égale aux salaires qu’il aurait perçus entre le licenciement et sa réintégration. Celle-ci est due sans déduction des indemnités tirées d’une autre activité (salaires, indemnités de sécurité sociale…) ayant pu être perçues pendant cette période. En revanche, elle ne se cumule pas avec les indemnités de rupture (Cass. soc. 26/03/2013, n° 11-27964) ni avec les allocations chômage (Cass. soc.19/11/2014, n° 13-23643).
    En revanche, si le salarié l’a demandée trop tardivement après ce délai, et sans justification, l’indemnisation est limitée aux salaires perdus entre sa demande de réintégration et cette dernière (Cass. soc. 26/03/2013, n° 11-27964). 
À noter

Si le salarié cumule plusieurs mandats, il a le droit à une seule indemnité : celle qui correspond à la période de protection expirant la dernière.

  • Le droit à réintégration dans le mandat 
    Le salarié est rétabli dans son (ou ses) mandat(s) si l’institution (CSE, représentant de proximité) n’a pas été renouvelée. Dans le cas contraire, il bénéficie de la protection contre le licenciement pendant 6 mois à compter du jour où il retrouve sa place dans l’entreprise (art. L. 2422-1 et 2 C. trav.). Les DS et RSS doivent faire l’objet d’une nouvelle désignation à condition que l’organisation syndicale soit toujours représentative. 

Le salarié n’a pas demandé sa réintégration 

Il a droit à une indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur des représentants du personnel, égale aux salaires bruts qu’il aurait perçus depuis son éviction jusqu’à l’expiration des périodes de protection suivantes : 

  • pour les élus au CSE, représentants de proximité : période d’indemnisation limitée à 30 mois de salaire (2 ans = 24 mois de durée minimale légale du mandat) + 6 mois (délai de protection suivant la fin du mandat) (Cass. soc. 15/04/2015, n° 13-24182 et 14/10/2015, n° 14-12193) ; 
  • pour les DS et RSS : période limitée à 12 mois de salaire (Cass. soc. 09/04/2014, n° 12- 23105) ;
  • pour les conseillers prud’hommes et les administrateurs de caisses de sécurité sociale : période limitée à 30 mois (2 ans + 6 mois) (Cass. soc. 03/02/2016, n° 14-17000) ;
  • pour les conseillers du salarié : période limitée à 30 mois (Cass. soc. 30/06/2016, n° 15- 12982). 
À noter

L’indemnité forfaitaire n’est due que si elle a été demandée avant la fin du délai de protection. À défaut, elle est fixée par le juge en fonction du préjudice subi (Cass. soc. 11/06/2013, n° 12-12738. 

Le salarié a également droit aux indemnités de rupture et à une indemnité pour licenciement illicite réparant le préjudice subi dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux prévus à l’article L. 1235-3 du Code du travail. 

Si le licenciement est nul car discriminatoire ou prononcé en raison de l’exercice de son mandat, l’article L. 1235-3 n’est pas applicable (barème d’indemnisation) et le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des 6 derniers mois (art. L. 1235-3-1 C. trav.).

À noter

Si le licenciement est illicite également pour un autre motif (non-respect des règles relatives aux accidents du travail, insuffisance du PSE…), le préjudice ne peut être réparé qu’une fois par l’indemnité la plus favorable au salarié (Cass. soc. 15/10/2013, n° 12-21746). 

Sanctions pénales : L’employeur qui licencie un salarié protégé sans autorisation ou malgré un refus d’autorisation est passible d’un an de prison et d’une amende de 3 750 euros (art. L. 2431-1, L. 2432-1 et L. 2433-1 C. trav.).

Autorisation de licenciement annulée

Lorsque l’autorisation de licenciement est annulée après un recours hiérarchique ou contentieux, le salarié a le choix de demander sa réintégration qui est de droit dans son emploi (art. L. 2422-1 à 3 C. trav.) ou, s’il préfère, une indemnisation. 

Le salarié a demandé sa réintégration 

  • Le droit à réintégration dans l’emploi et à indemnisation 
    Une fois l’annulation définitive, le salarié peut demander sa réintégration, dans les 2 mois suivant la notification de la décision d’annulation (art. L. 2422-1 C. trav.). Ce délai n’est susceptible d’aucun report (Cass. soc. 05/12/2018, n° 17-26325).
    Le salarié a droit à une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration effective si elle a été demandée dans les 2 mois suivant la notification de la décision d’annulation, déduction faite des autres revenus qu’il aurait pu percevoir durant cette période (art. L. 2422-4 C. trav. et Cass. soc. 29/09/2014, n° 13-15733) et des indemnités de rupture (Cass. soc.01/02/2017, n° 15-20739). Pôle emploi peut donc demander au salarié le remboursement des allocations chômage (Cass. soc. 19/11/2014, n° 13-23643). L’indemnité couvre à la fois le préjudice matériel et moral (Cass. soc. 12/11/2015, n° 14-10640) et n’a pas de caractère forfaitaire car la rupture du contrat n’intervient pas en méconnaissance du statut protecteur des représentants du personnel (Cass. soc. 02/03/2017, n° 15-25273). 

    L’employeur doit réintégrer le salarié dans son emploi initial, au même niveau de rémunération et sur le même lieu. Si cet emploi ou un emploi « équivalent » ne lui est pas proposé, le licenciement du salarié suite à son refus des propositions de reclassement est nul, même si le salarié n’est plus protégé au moment du licenciement (Cass. soc. 05/09/2018, n° 16-19912).

À noter

Le salarié peut également demander des dommages et intérêts pour licenciement abusif. D’autre part, si le juge administratif a annulé l’autorisation en raison d’un lien avec le mandat, le conseil de prud’hommes ne peut considérer que le licenciement est justifié (Cass. soc. 30/06/2016, n° 15-11424).

Modèle de lettre de demande de réintégration dans son emploi après une annulation de l’autorisation de licenciement 
Lettre recommandée avec AR (à envoyer dans les 2 mois de la notification de la décision d’annulation) 
Coordonnées du salarié 

[Nom, adresse, ville] 
[Nom de l’employeur] 
[Adresse] 

Monsieur le directeur/Madame la directrice des Ressources humaines, 

Par courrier du [date], vous m’avez notifié mon licenciement pour … motif [préciser]. 

Or, le ministre du Travail (ou le tribunal administratif) a annulé le [date] l’autorisation de licenciement accordée par Monsieur (Madame) X inspecteur(trice) du travail de [lieu]. 

Aussi, par la présente, je me permets de vous demander de bien vouloir me réintégrer dans mon emploi et de me verser les salaires qui me sont dus depuis le jour de mon licenciement [date], jusqu’au jour de ma réintégration effective dans l’entreprise. 

En vous remerciant par avance, je vous prie d’agréer, Monsieur (Madame), l’expression de mes salutations distinguées. 

[Nom et signature] 

Le salarié transféré dans une autre entreprise, dont l’autorisation de transfert a été annulée, doit être réintégré dans son entreprise d’origine s’il le demande et peut demander sa réintégration hors du délai de 2 mois (Cass. soc. 13/12/2017, n° 15-25108). 

  • Le droit à réintégration dans le mandat 
    Le salarié est rétabli dans son (ou ses) mandat(s) si l’institution (CSE, représentant de proximité) n’a pas été renouvelée. Dans le cas contraire, il bénéficie de la protection contre le licenciement pendant 6 mois à compter de sa réintégration (art. L. 2422-2 C. trav.).
    Les DS et RSS doivent faire l’objet d’une nouvelle désignation à condition que l’organisation syndicale soit toujours représentative. 

Le salarié n’a pas demandé pas sa réintégration 

Lorsque l’annulation est devenue définitive, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de sa perte de salaire entre le licenciement et la fin du délai de 2 mois suivant la notification de la décision d’annulation, délai dont il dispose pour demander sa réintégration (art. L. 2422-4 C. trav.).

Le salarié a également droit aux indemnités de licenciement et éventuellement à des dommages et intérêts pour licenciement abusif. 

Que se passe-t-il si le refus d’autorisation de licenciement est annulé ? 

L’annulation d’une décision de refus ne permet pas pour autant à l’employeur de licencier. Dans ce cas, l’employeur doit solliciter de nouveau l’inspecteur du travail d’une demande d’autorisation de licenciement.

• Protection contre la discrimination syndicale : art. L. 1131-1 et 2, L. 1132-1 à 4, L. 1134-1 à 10, L. 2141-5 à 8, L. 2146-2 C. trav.
• Protection contre l’entrave : art. L. 2141-4, L. 2141-9, L. 2141-11 à 22, L. 2146-1, L. 2317-1 et 2, L. 2335-1, L. 2346-1 C. trav.
• Protection des représentants du personnel contre la rupture du contrat de travail et en cas de transfert partiel d’entreprise : art. L. 2411-1 à 14, L. 2414-1 C. trav.
• Procédure d’autorisation préalable à la rupture et au transfert du contrat : art. L. 2421-1 à 10, L. 2421-9, L. 2422-1 à 4 C. trav.
• Dispositions pénales : art. L. 2431-1, L. 2432-1, L. 2433-1, L. 2434-1, L. 2437-1 C. trav.

La protection des élus n’a pas fait l’objet d’une réforme à proprement parler. Pour autant, les ordonnances réformant le Code du travail du 22 septembre 2017 ont supprimé ou modifié de nombreux articles (c’est-à-dire déplacés en changeant de numérotation et souvent de contenu). Aussi, pour éviter tout risque d’erreur, nous vous conseillons de vous reporter à la table des matières du Code du travail sur Légifrance et de lire les articles à jour, thème par thème, à la fois dans la partie législative et plus loin dans la partie réglementaire.

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